27 mars 2020
Covid-19 – Loi d’urgence et incidences sur le Droit des sociétés : publication des ordonnances au JO
Parmi les 25 ordonnances prises en application de la loi d’urgence n° 2020-290 du 23 mars 2020 pour faire face à l’épidémie de Covid-19 et présentées en Conseil des ministres le 25 mars 2020, deux textes intéressent tout particulièrement le droit des sociétés.
1.Ordonnance n° 2020-318 du 25 mars 2020 qui proroge plusieurs délais relatifs à l’établissement, l’arrêté, l’audit, la revue, l’approbation et la publication des comptes et des autres documents et informations que les personnes morales et entités dépourvues de personnalité morale de droit privé sont tenues de déposer ou publier
–Sociétés anonymes à directoire et conseil de surveillance : Prorogation, pour une durée identique, du délai de trois mois imparti au directoire pour présenter au conseil de surveillance aux fins de vérification et de contrôle, les documents destinés à l’assemblée générale ordinaire annuelle.
Cette disposition est applicable aux entités clôturant leurs comptes entre le 31 décembre 2019 et l’expiration d’un délai d’un mois après la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire. Elle n’est toutefois pas applicable si le commissaire aux comptes a émis son rapport sur les comptes avant le 12 mars 2020.
–Prorogation de trois mois des délais imposés par la loi ou les statuts pour l’approbation des comptes annuels ou pour la convocation de l’assemblée générale appelée à les approuver (en règle générale l’approbation des comptes doit avoir lieu dans les six mois de la clôture de l’exercice social).
Cette mesure s’applique à toutes les sociétés et plus globalement aux personnes morales et entités dépourvues de personnalité morale de droit privé qui clôturent leurs comptes entre le 30 septembre 2019 et l’expiration d’un délai d’un mois après la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire.
Elle n’est toutefois pas applicable si le commissaire aux comptes désigné par l’entité a rendu son rapport sur les comptes avant le 12 mars 2020.
–Documents de gestion prévisionnelle : Prorogation de deux mois des délais imposés aux conseils d’administration, aux directoires ou aux gérants des sociétés comptant 300 salariés ou plus ou dont le montant net du chiffre d’affaires est au moins égal à 18 millions d’euros, pour établir les documents comptables visés par l’article L.232-2 du Code de commerce.
Cette mesure est applicable aux documents relatifs aux comptes ou aux semestres clôturés entre le 30 novembre 2019 et l’expiration d’un délai d’un mois après la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire.
–Sociétés en cours de liquidation amiable : Prorogation, pour une durée identique, du délai de trois mois imparti au liquidateur pour l’établissement des comptes annuels et du rapport écrit sur les opérations de liquidation au cours de l’exercice écoulé. Cette disposition est applicable aux entités clôturant leurs comptes entre le 31 décembre 2019 et l’expiration d’un délai d’un mois après la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire.
–Organismes de droit privé bénéficiaires d’une subvention publique : prorogation de trois mois du délai de six mois imparti pour produire le rapport financier visé au 6ème alinéa de l’article 10 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000, relatif aux comptes clôturés entre le 30 septembre 2019 et l’expiration d’un délai d’un mois après la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire.
2. Ordonnance n° 2020-321 du 25 mars 2020 qui adapte les règles de réunion et de délibération des assemblées et organes dirigeants des personnes morales et entités dépourvues de personnalité morale de droit privé afin de les adapter à la situation de confinement actuelle
A titre liminaire, nous précisons que cette ordonnance est applicable aux assemblées et aux réunions des organes collégiaux d’administration, de surveillance et de direction tenues à compter du 12 mars 2020 et jusqu’au 31 juillet 2020, sauf prorogation de ce délai jusqu’à une date fixée par décret et au plus tard le 30 novembre 2020.
–Adaptation des règles de convocation des sociétés cotées : aucune nullité des assemblées n’est encourue lorsqu’une convocation devant être réalisée par voie postale n’a pu l’être en raison de circonstances extérieures à la société (épidémie de covid-19).
– Information des membres : l’exercice du droit de communication d’un document ou d’une information, dont les membres d’une assemblée jouissent préalablement à la tenue de celle-ci, peut être valablement effectué par message électronique.
– Adaptation des règles de participation et de délibération : l’assemblée peut se tenir sans que les membres et les autres personnes ayant le droit d’y assister ne soient présents physiquement ou par conférence téléphonique ou audiovisuelle, à condition que ladite assemblée soit convoquée en un lieu affecté, à la date de la convocation ou à celle de la réunion, par une mesure administrative limitant ou interdisant les rassemblements collectifs pour des motifs sanitaires.
Dans ce cas, les membres participent ou votent à l’assemblée selon les autres modalités prévues par les textes qui la régissent et par la présente ordonnance.
– l’ordonnance instaure ici une dérogation exceptionnelle et temporaire au droit des membres des assemblées d’assister aux séances ainsi qu’aux autres droits dont l’exercice suppose d’assister à la séance (tels que le droit de poser des questions orales ou de modifier les projets de résolutions en séance dans les sociétés anonymes et les sociétés en commandite par actions) ;
– cette mesure est en revanche, sans effet sur le droit de voter, ou le droit de poser des questions écrites ou encore le droit de proposer l’inscription de points ou de projets à l’ordre du jour dans les sociétés anonymes et les sociétés en commandite par actions.
-Assouplissement du recours à la visioconférence et aux moyens de télécommunication :
-en l’autorisant exceptionnellement pour les groupements pour lesquels ce mode de participation alternatif n’est pas déjà prévu par la loi (approbation des comptes en SARL par exemple),
– pour les groupements pour lesquels ce mode de participation alternatif est déjà prévu par la loi (sociétés anonymes non cotées, sociétés par actions simplifiées, les groupements d’intérêt économique et les sociétés civiles) mais sous réserve de certaines conditions, lesdites conditions se trouvent exceptionnellement neutralisées (en particulier la condition tenant à l’existence d’une clause à cet effet dans les statuts ou le contrat d’émission).
-Les réunions des organes collégiaux (tels que par exemple le conseil d’administration, le conseil de surveillance, le directoire…) pourront désormais se tenir par voie dématérialisée, y compris pour l’arrêté des comptes annuels. Ainsi, pour les sociétés anonymes, les règles de quorum normalement applicables requérant la présence physique d’au moins la moitié en nombre des administrateurs ou des membres du conseil de surveillance dans le cadre des décisions relatives aux comptes sociaux et consolidés sont écartées.
Toutes clauses contraires statutaire ou contractuelle sont neutralisées sous réserve, dans chaque cas, que les moyens de visioconférence ou de télécommunication respectent les caractéristiques fixées par la loi et les règlements pour garantir l’intégrité et la qualité des débats.
–Assouplissement du recours à la consultation écrite des assemblées y compris celles relatives à l’arrêté ou à l’examen des comptes annuels pour lesquelles ce mode de participation alternatif est déjà prévu par la loi, en la rendant possible malgré la présence ou l’absence d’une clause statutaire ou contractuelle.
Les décisions des organes collégiaux (le conseil d’administration, le conseil de surveillance, le directoire…), y compris celles relatives à l’arrêté ou à l’examen des comptes annuels, pourront-elles aussi désormais être prises par voie de consultation écrite de leurs membres.