Commerce international – IRAN – Levée des sanctions – CISADA
Introduction
Nous avons fait juger qu’une banque française ne pouvait opposer la législation américaine visant les mesures restrictives prises à l’encontre de l’Iran pour refuser un virement concernant un marché Iranien, émanant d’une banque chinoise, et réalisé en euros.
Pour qui ?
Notre cliente est spécialisée dans la production de boitiers de filtration d’eau grâce à des membranes en fibre de verre doublé dont elle est l’inventeur et qui font l’objet de brevets régulièrement déposés.
Pour quoi ?
Elle a notamment pour partenaire commercial une société Iranienne, spécialisée dans le traitement des eaux provenant de l’exploitation du pétrole et avec laquelle les relations commerciales sont établies depuis plusieurs années.
Compte-tenu des restrictions et embargos appliqués aux exportations vers l’Iran, notre cliente demandait la nécessaire autorisation du Trésor lorsqu’il s’agissait de recevoir des fonds relatifs à ce partenariat.
En 2016, s’est profilé un nouveau contrat avec la société Iranienne, et notre cliente s’est enquise auprès du Trésor s’il était toujours nécessaire de présenter les demandes d’autorisation concernant le commerce avec l’Iran.
Au vu de l’entrée en vigueur du Règlement Prolifération Iran Consolidé, le Trésor lui répondait que les sanctions avaient été majoritairement levées à compter du 16 janvier 2016.
Notre cliente avisait alors sa banque – laquelle était informée de ses relations commerciales établies avec une société Iranienne – de ce qu’un virement allait être émis en sa faveur depuis une banque étrangère à l’Iran, comme l’exige la procédure mise en place par le Trésor en accord avec la règlementation contre le blanchiment d’argent.
Ce virement a été accepté par la banque et crédité le jour même sur le compte de notre cliente.
La somme versée a ensuite été retirée de son compte par la banque prétextant que l’Iran restait soumis à embargo américain en vertu de la loi CISADA du 1er juillet 2010 et des dispositions subséquentes prises par l’administration américaine.
Notre cliente a été autorisée par le Tribunal de Commerce de Romans sur Isère, à assigner la banque en référé d’heure à heure aux fins de la voir condamnée à recréditer son compte bancaire de la somme indument prélevée par elle.
Le Tribunal de Commerce de Romans sur Isère a fait droit à cette demande, ordonnant à la banque de restituer la somme prélevée, sous astreinte de 2 000 € par jour de retard à compter de la signification de l’ordonnance.
Comme ça
Le Tribunal a relevé que les parties s’accordaient à reconnaitre que l’accord de Vienne en date du 14 juillet 2015 avait permis de lever l’essentiel des sanctions économiques européennes et du Conseil de Sécurité des Nations Unies, à l’égard de l’Iran.
Dès lors, et conformément à cet accord, les interdictions concernant les transferts financiers ont été levées dans le cadre des échanges entre l’Union Européenne et l’Iran, et ce à compter du 16 janvier 2016.
Seules les activités en lien avec le nucléaire restaient ainsi concernées par une interdiction.
Si le Tribunal a relevé que la banque, disposant d’une succursale aux Etats-Unis, estimait être concernée par les dispositions de la législation américaine et, de ce fait, par l’embargo mis en place à l’encontre de l’Iran, il a néanmoins considéré qu’elle ne justifiait pas de démarches de dénonciation relatives au soupçon pesant sur la provenance des fonds.
Le Tribunal a en outre constaté que le virement litigieux avait été réalisé en euros et n’était donc pas concerné par les mesures restrictives mises en place par les Etats-Unis, qui s’appliquent exclusivement aux virements réalisés en dollars.
Les juges ont également retenu que, nonobstant les conditions générales visées dans la convention de compte signée entre notre cliente et la banque, lesquelles contenaient une clause relative à la possibilité pour cette dernière de rectifier une inscription faite au débit ou au crédit du compte, la contre passation effectuée par la banque ne se justifiait pas au regard des constatations précédemment faites, ce qui a conduit le juge des référés à relever l’existence d’un trouble manifestement illicite.
Cette décision a été efficace, puisque l’argent était à nouveau crédité sur le compte bancaire de notre cliente deux jours après le délibéré.